Le Premier ministre, chef du gouvernement, Albert Ouédraogo, a rencontré, le jeudi 8 septembre dernier, les leaders religieux de la zone dite « Grand Ouest » du Burkina Faso, comprenant les régions des Hauts-Bassins, du Sud-Ouest, des Cascades et de la Boucle du Mouhoun.
Autant dire un pan important de la communauté nationale dans un contexte où les terroristes font feu de tout bois dans cet espace. La rencontre initiée par le ministère des Affaires religieuses et coutumières devrait faire tache d’huile et s’étendre aux autres grandes entités géographiques du pays. Au lendemain du discours du président du Faso qui a réveillé le sentiment patriotique en mettant chacun de ses compatriotes devant le saut historique du 4 septembre 1947, il ne fait aucun doute, cette tribune est un véritable vivier pour préserver le Burkina de la volonté des oiseaux de mauvais augure et gagner le retour des fils égarés dans la République.
Le Grand Ouest a ses spécificités dont les actions mises ensemble avec les autres seront de nature à créer cette osmose tant attendue et décrite sous le label de réconciliation nationale. Le Burkina en a véritablement besoin. Et cette mosaïque qui constitue le Grand Ouest est bien une source de sagesse et une région qui a vu naître des hommes et des femmes qui n’ont jamais reculé devant leur engagement pour l’unité nationale. Si la démarche consiste à faire comprendre aux leaders religieux leur rôle, c’est une belle initiative. Si c’est une invite à être des modèles d’une communauté qui a sa partition à jouer dans la quête d’une solution durable à la crise sécuritaire que le Burkina traverse, c’est déjà le bon bout. Et si cette rencontre est prise sous ce prisme, elle donne aux leaders de cette partie du pays, le poids de leurs responsabilités. Ils doivent communiquer, diriger les brebis égarées vers le bon pâturage et leur montrer cette voie qui a toujours été celle de la cohésion, du respect et du vivre-ensemble au moment où les bandits cachés sous le vocable de terroristes ont jeté leur dévolu sur le Grand Ouest. Cette rencontre vient donc à point nommé. Elle ragaillardit les leaders et les remet incontestablement dans leur rôle historique. Ils sont mis en mission avec dorénavant des arguments nécessaires pour rallier à la République les fils de leurs localités qui ont opéré le mauvais choix de prendre les armes contre leurs frères. Ils devront donc partager leurs expériences qui reposent sur le socle de la sociologie du milieu, de l’histoire d’une communauté qui n’a jamais plié l’échine. C’est bien à l’Ouest que Samory Touré, grand conquérant, a connu sa défaite. Nous avons aussi en mémoire la révolte des Bwa, la première grande révolution de notre pays qui était encore sous le joug colonial (1915-1917). Ce qui est certain, tous ces leaders de la partie occidentale du Burkina Faso, conscients de leur rôle majeur et attentifs aux discours du chef du gouvernement, sauront donner une suite favorable aux messages des messagers du président du Faso qui peuvent se résumer en une phrase : couper l’évolution de l’hydre terroriste et garder intacte l’unité des filles et fils de ce pays. Au-delà de la particularité des actes mémorables des leaders du Grand Ouest, l’histoire nous enseigne que les coutumiers et religieux ont toujours su jouer un rôle important dans la marche du pays. En témoigne, entre autres, l’implication personnelle du Mogho Naaba Kom II dans la lutte pour la reconstitution de la Haute-Volta dans ses frontières en 1947.
D’une manière générale, les garants de nos traditions sont un maillon indispensable pour la cohésion sociale et la paix. Et pour qu’ils puissent jouer pleinement ce rôle, ils ont besoin d’un cadre réglementaire légal qui encadre leurs actions. C’est en cela que le statut des coutumiers et religieux serait le bienvenu s’il venait à voir le jour. Cela pourrait situer clairement leur rôle dans la société. Un rôle qui est certainement bien plus que faire de la politique. Des pays voisins comme la Côte d’Ivoire et le Ghana ont élaboré des statuts pour les chefs traditionnels et coutumiers. Ainsi, ces derniers interviennent dans le débat public conformément aux prescriptions de leur statut. C’est possible le cas du Royaume- Uni où le monarque, tout en gardant une neutralité politique, s’emploie au quotidien à l’unité et à la cohésion du royaume. Ainsi, le nouveau roi Charles III, à peine couronné, est attendu pour recoller les morceaux d’un Royaume-Uni secoué par le Brexit et les velléités indépendantistes. Les bons exemples devant inspirer, le Burkina devrait aller à l’école de ces pays pour prendre conseils.
Assetou BADOH