L’élection du Président de la Fédération burkinabè de football (FBF) est prévue pour se tenir le 22 août 2020 à Bobo-Dioulasso. Jusque-là, nous enregistrons six candidats en lice. Chacun y vas de son talent et de son programme pour relever le football burkinabè. Pour en savoir plus sur la mission assignée au président de la FBF et la personnalité la mieux indiquée pour ce poste, nous avons rencontré l’un des doyens du football burkinabè, à la personne de Mahanmadi Lamine Koanda, l’homme qui n’a pas sa langue dans sa poche. En rappel, Mahamadi Koanda a été ramasseur de balles de l’Étoile filante de Ouagadougou (EFO) de 1966 à 1970 . Il a été aussi président d’inter quartier de Ouagadougou de 1974 à 1980.
Puis élu président de l’EFO le 29 novembre 1993 à mars 1996. En outre il a été le Coordonnateur de la Coordination des supporters des étalons en 1975 lors des jeux d’Accra et de Lagos. Une coordination qui a eu le financement de l’État sous le régime du Front Populaire ou l’ex-président de la FBF Souley Mohamed a été son adjoint. Bref, c’est une mémoire vivante du football burkinabè qui nous apporte son témoignage de l’évolution de cette discipline de la Haute-Volta au Burkina Faso. Évidemment, il se prononce sur la personne idéale qui peut présider avec honneur la bonne marche de la FBF.
I-Burkina : Monsieur Mahamadi Lamine Koanda, en tant que l’un des doyens dans le monde sportif burkinabè et particulièrement le football, comment appréciez-vous l’évolution de ce sport roi au Burkina ?
El Hadj Mahamadi Lamine Koanda : Merci de venir s’entretenir avec moi pour avoir ma part de vérité sur l’évolution du football burkinabè. J’ai été moi-même dès l’enfance un passionné du football. Seulement à notre époque, il y avait deux possibilités pour pratiquer le football : ceux qui étaient scolarisés et les jeunes des quartiers s’organisaient également pour jouer au football. Les joueurs comme SAP Olympique, Zagalo, Souley de Kamsonghin, Zongo François paix à son âme, Ali Koné, Rasmane Pélé paix à son âme, Issa Diarra paix à son âme, ont tous porté haut le flambeau du football burkinabè et je les rends hommage !
Maintenant comment j’apprécie l’évolution du football burkinabè ?
Je ne tournerais pas autour du pot à cette question! Le Football burkinabè est présentement très malade mentalement et physiquement. L’environnement a changé. En 2012, Sita Sangaré a remplacé Zambendé Théodore Sawadogo sur insistance du ministre des Sports de l’époque Yacouba Ouédraogo dit YAC. Il a procédé à ce changement parce qu’il avait des rancunes d’enfance contre Zambendé Théodore Sawadogo. YAC a été candidat contre Zambendé Théodore Sawadogo en 2008 et il a perdu son élection. En 2011 quand il est devenu ministre des Sports, YAC ne voulait pas laisser Zambendé Théodore Sawadogo continuer à présider la FBF. C’est vrai que l’État ne se mêle pas, mais dès lors que le ministre ne veut pas que Zambendé Théodore Sawadogo soit Président il ne pouvait pas y rester. A l’époque l’ex-président Blaise Compaoré a dit à Zambendé Théodore Sawadogo de rester à son poste de directeur général de la LONAB et de laisser le ministre des Sports de l’époque faire son choix. Et le ministre YAC a choisi Sita Sangaré comme son candidat. C’est ce qui a permis à Sita Sangaré de devenir Président de la FBF.
L’histoire retient que c’est le bureau de Zambendé Théodore Sawadogo qui a qualifié l’équipe nationale du Burkina à la phase finale de 2016.
Dieu merci, les Étalons sont revenus la tête haute. Par la suite, aucun engagement n’a été respecté par la FBF ni dans la structuration, ni matériellement, ni financièrement. Avec la victoire de l’Afrique du sud (Les Étalons étaient classés 2ème), le ministre YAC était satisfait. Je tiens à signaler qu’Il n’y a aucun conflit personnel entre nous, mais malheureusement il n’a pas respecté les engagements. Ça nous a cassé le moral, mais cela ne m’a pas empêché de continuer à apporter mon soutien au football burkinabè avec le concours de mes amis et mes relations personnelles. Le football à vrai dire se joue sur trois terrains : le jeu physique sur le terrain, le jeu psychologique et l’animation des supporters. Il faut nécessairement équilibrer ces trois facteurs pour avoir une bonne prestation du jeu footballistique.
C’est dommage, car aujourd’hui le football burkinabè n’a ni le soutien psychologique, l’animation sur le terrain est clanique et inféodée à la personne de Sita Sangaré. Comme il est ‘’puissant’’, le ministre des Sports actuel ne fait que subir.
Dans le monde entier, la pratique du football s’entoure d’effet psychologique. Chaque pays a son ‘’wack’’ou sa magie.
Aujourd’hui, je ne pars plus au terrain, car nous sommes mal accueillis. Il faut être un béni-oui-oui du ministre des Sports ou de Sita Sangaré pour être bien reçu au stade. Ils ont leur protocole qui réserve un accueil chaleureux à ceux qui les courtisent, leurs fans, leurs amis au détriment de ceux qui ont contribué à poser les bases fondamentales du football voltaïque et burkinabè. Au regard de toutes ces dérives, je souhaite à la tête de la FBF un président responsable comme Amado Traoré. Je sais que le combat sera difficile, parce que seul Sita Sangaré sait pourquoi on lui a dit de ne pas être candidat et il continu à vouloir choisir son candidat.
S’il est conscient que sa gestion de huit ans est propre, il n’a pas besoin de se battre coûte que coûte pour mettre quelqu’un qui sera à ses ordres.
Quelles sont vos observations sur la FBF actuellement par rapport à sa mission ?
La FBF a lamentablement échoué !
Monsieur le doyen, le coronavirus a contraint l’annulation du championnat 2019 -2020. Qu’en pensez-vous de cette décision de la FBF qui divise les clubs ?
Ce n’est pas honnête. La FBF a été partisane. Elle devrait engager un dialogue avec les clubs. Cette décision unilatérale n’obéit à aucune logique.
L’évènement majeur cette année 2020 est l’élection du Président de la FBF. Pouvez-vous nous éclairer en tant que l’une des personnes ressources du football burkinabè de l’importance du rôle du président de la FBF et surtout le profil de la personnalité qui s’adapte à ce poste ?
Logiquement pour être président d’un club d’abord, il faut avoir les moyens financiers.
Parce qu’en toute sincérité, la passion de diriger le football rime aussi avec les moyens financiers personnels qu’on peut s’engager à investir. C’est avant tout un sacrifice personnel. On ne doit pas chercher à parvenir à ce poste pour s’enrichir. Ce n’est pas honnête !
Alors que parmi les prétendants, je ne vois que Amodo Traoré seul, qui a déjà fait ses preuves en la matière. Parce qu’il a déjà été président de club, il est indépendant financièrement. A ma connaissance, il mène un certain nombre d’activités qui lui mettent à l’abri du besoin. Par contre : Lazare Banssé est un salarié de Bolloré ;
Laurent Kaboré est un inspecteur de douane, donc un fonctionnaire et un salarié. On peut l’affecter à tout moment peut-être à Bruxelles pour représenter les intérêts du Burkina. Bertrand Kaboré c’est certes un homme d’affaire, mais je ne pense pas que ses activités prospèrent comme il le souhaite.
Quant à Abdoul Karim dit Lota, c’est mon petit neveu et je ne sais pas quels sont ses moyens pour gérer une fédération. Il est jeune et il aurait cherché d’abord, à être président des supporters pour préparer l’avenir. Il ne m’a pas consulté pour prendre des conseils.
Actuellement il y a six candidats en lice pour la présidence de la FBF: Amado Traoré, Lazare Banssé, Mory Sanou, Bertrand Kaboré, et Abdoul Karim Baguian ‘’Lota’’. Connaissez-vous personnellement sur le plan footballistique les différents candidats ?
Je connais individuellement chacun d’eux.
Amado Traoré : Il a beaucoup apporté à la bonne marche du football burkinabè dans son ensemble. Il est non seulement passionné du football, mais surtout il s’y investit sur tous les plans à la formation et à la promotion des jeunes talents du football burkinabè. Techniquement c’est déjà le profil idéal pour être le président de la FBF.
C’est un chef d’entreprise, et tel que je le connais il n’hésitera pas à se donner à fond en engageant ses propres moyens pour relèver le défi du football burkinabè.
A cela s’ajoute ses qualités humaines : il est humble, modeste, respectueux, généreux, disponible, un homme de dialogue, compréhensible et compréhensif.
Donc, Amodo Traoré, comme président de la FBF donnera un coup accélérateur à la vitalité du football au niveau continental.
Bertrand Kaboré : Je ne sais pas trop ce qu’il fait. Il aime certes, le football, mais je pense qu’il est mieux placé pour un être un Vice-Président. Je ne pense pas qu’il a les ressources nécessaires pour faire face aux exigences de la FBF.
Lazare Banssé : Il a été président de l’EFO. Je l’ai soutenu durant ces deux mandats, mais vers la fin il a abandonné l’EFO. Quand l’EFO partait à Ziniaré pour un match, il n’est pas venu. C’est Zambendé Théodore Sawadogo, Komi Samba Antoine (Paix à son âme) et moi, qui avions cotisés pour soutenir l’Étoile à Ziniaré. Il est le candidat de ‘’quelqu’un’’ qui veut le diriger dans l’ombre. Si je suis électeur, je ne le voterais pas.
Mory Sanou : Il serait plus utile au football burkinabè en restant Directeur technique des Étalons. Il n’a pas les moyens pour être président d’un club de football.
Laurent Kaboré : Il a la carrure. C’est un fonctionnaire de l’État. Il devrait être président de la FBF il y a quatre ans, mais il a échoué. J’aurais préféré qu’il compose avec Amado Traoré.
Abdoul Karim Baguian dit ‘’Lota’’ : Je n’ai rien à dire!
Les élections sont prévues pour se tenir en Août prochain à Bobo Dioulasso. Le camp Amado Traoré a déjà alerté l’opinion sur un problème lié à la procédure de la mise en place de la commission électorale dont certains textes de la FIFA ne sont pas respectés et craint pour la transparence de cette élection. Est-ce que vous avez eu écho de cela?
Bien sûr ! Nous avons tous les contacts de la FIFA. Les textes aussi sont bien connus. En cas de tricherie, je ne pense pas que ça peut marcher. Celui qui cherche un favoritisme pour un des candidats à la présidence de la FBF ne parviendra.
Le fair-play est la sève nourricière de la discipline sportive. Quel message avez-vous à adresser aux différents candidats pour une issue pacifique à l’élection du président de la FBF ?
La meilleure façon est que le président sortant Sita Sangaré ne se mêle pas de cette élection. Il y va de son honneur personnel. Que cette élection se déroule dans la transparence totale et que le méritant puisse réellement remporter. C’est dans l’intérêt supérieur du football burkinabè. Le pays a déjà suffisamment de problèmes. Il ne faudrait pas qu’on ajoute encore des étincelles pour aggraver la situation sociale qui est précaire actuellement. Le football est avant tout, un sport de rassemblement et de rapprochement.
Que cet esprit nous guide tous !
Interview réalisée par JT