D’une sagesse légendaire, le président Georges Marshall est une figure charismatique dans le monde sportif burkinabè, pour avoir dirigé plusieurs années l’Etoile filante de Ouagadougou (EFO) et l’Espérance sportive de Ouagadougou (ESO). En outre il est surtout un fervent croyant catholique car ayant été successivement président du Conseil paroissial des laïcs de la paroisse Christ Roi de Pissy, président national des laïcs et sollicité de nouveau depuis le 12 Août 2018 pour présider encore la Communauté Chrétienne de Base (CCB) de Saint Joseph de Pissy. Leader d’opinion et témoin de l’évolution sociopolitique du Burkina, nous l’avons rencontré à sa résidence à Ouagadougou pour avoir son opinion sur les questions d’actualité. Sans détour, il nous parle à cœur ouvert.
I-Burkina : Monsieur le Président Marshall, vous êtes une des figures charismatiques au Burkina surtout à travers le football ou vous avez été président de l’EFO, de l’ESO etc. Ces dernières années multiples disciplines sportifs (football, cyclisme, athlétisme, boxe, karaté etc.) se sont brillamment illustrés au niveau continental. Comment appréciez-vous l’essor actuel du secteur sportif burkinabè ?
Georges Marshall : Le sport au Burkina Faso connait véritablement une évolution spectaculaire qui nous donne tous des satisfactions. Je dis cela par ce qu’il fût un temps où les athlètes et les artistes il fallait aller les chercher ailleurs tout simplement il y avait la rareté. Aujourd’hui, nous avons des écoles professionnelles de football, des sportifs qui gagnent maintenant leur pain à travers le sport et cela est très encourageant pour les encadreurs, le gouvernement et les sportifs eux-mêmes.
Que peut mieux faire le gouvernement burkinabè, les supporters et les sportifs eux-mêmes pour maintenir le cap de ce progrès remarquable ?
Pour être très franc avec vous, je dirais que le gouvernement est très regardant sur l’ensemble des disciplines sportifs. Il s’y engage à la hauteur des possibilités. Maintenant il faudrait que les encadreurs, des dirigeants sportifs d’œuvrer de même à leur niveau pour maintenir le cap de cette persévérance. Si je vous avoue qu’aujourd’hui nous sommes plus en carence de dirigeants que de sportifs, vous serez étonné. Et j’insiste nous sommes plus en carence de responsables sportifs que de sportifs. C’est pourquoi vous apercevez des fois des insuffisances dans le football.
Au-delà du sport, vous êtes aussi un observateur avisé de l’évolution sociopolitique du Burkina Faso. De la période transitoire à l’élection du président Kaboré en 2015, jusqu’à nos jours ; comment va le Burkina actuellement ?
Vous savez, je suis un peu mal placé pour répondre à cette question. Mais comme vous me la posez j’assumerais ma réponse à votre question. Le Burkina Faso, franchement se porte bien ! Le Burkina Faso est un pays béni et je ne suis pas la première personne à le dire. La politique au Burkina Faso est évolutive et toute personne honnête et neutre ne niera pas ce que je viens de dire.
Vous avez sans doute suivi le discours du Premier ministre Christophe Marie Joseph Dabiré sur la situation de la Nation. Quels sont les points saillants qui ont retenus votre attention ?
Le Premier ministre dit ce qu’il pense au fond du cœur en ce qui concerne la situation de la Nation. Son discours a été plus pédagogique que politique. Des vérités que certains auraient dus cacher ont été étalées. Une Assemblée nationale multicolore comme la nôtre qui approuve le discours le discours du Premier ministre, c’est que vraiment le message a été franc. Il n’y a pas eu de tabou et je pense que c’est un plus pour lui.
« Bâtir avec le peuple, un Burkina Faso de démocratie, de progrès économique, de liberté et de justice » a été décliné à travers le PNDES. Votre constat après trois ans d’exécution de cette ambition politique ?
Dans l’ensemble continuons à remercier le Seigneur. Je n’aime pas les débats stériles et les polémiques inutiles. Le simple constat que je fais est que les chantiers du PNDES sont en marche. Mais depuis l’arrivée au pouvoir du Président Roch Marc Christian Kaboré quel est le fonctionnaire qui ne touche pas mieux par rapport aux trois dernières années ? Mais comme disait le philosophe : « L’homme est un éternel insatisfait ». A mon humble avis ce qui est plus important pour tous les burkinabè actuellement c’est de consolider la paix, la sécurité du territoire et l’harmonie sociale.
Tout comme son prédécesseur, l’actuel chef du gouvernement a reconnu dans son discours que le contexte sécuritaire actuel inhibe l’action du gouvernement et met à rude épreuve, la cohésion sociale. Quel sursaut patriotique devrait animer le peuple burkinabè pour surmonter ces obstacles ?
C’est une vérité qu’il a martelée. Aujourd’hui tout le monde vit dans la psychose quel
que soit le lieu où on se trouve. Dans les églises, les temples, les mosquées, les marchés, les lieux de distractions etc. les inquiétudes règnent. En pleine prière et en pleine messe un pasteur, un prêtre, des imams et des fidèles sont tués. Nous sommes tous affligés par ces agitations. L’objectif des malfaiteurs est de parvenir à opposer les burkinabè entre eux et à semer le chaos. Fort heureusement, la maturité aidant, les burkinabè ne tomberont pas dans leur piège. A toutes les épreuves la solidarité, la fraternité et le patriotisme nous rapprochent. La preuve il y a eu une forte délégation de la communauté musulmane qui est partie témoigner leur compassion au Cardinal Philippe Ouédraogo après l’assassinat du prêtre et des fidèles en pleine messe. C’est un bon exemple. A ce stade il faut nécessairement la cohésion sociale pour relever le défi. Dans ce sens j’invite les hommes politiques à jouer également leur partition pour rapprocher les populations et non à les diviser pour leurs propres intérêts. De toute façon je suis persuadé que chacun aura son tour de gouverner le pays quand Dieu sonnera son heure. Par ce que dans le monde d’aujourd’hui tout se sait et tout se paie sur cette terre.
Au défi sécuritaire se greffe malheureusement des remous sociaux incessants et intransigeants et une activité économique morose. Peut-on toujours espérer voir le bout du tunnel et comment ?
Dire que l’activité économique est morose, je n’y crois pas à cette assertion. Quant aux revendications tous azimuts, je pense que même si c’est leur droit, la situation actuelle du pays devrait interpeller les uns et les autres à la pondération. Comme dit un proverbe des mossé : » Duni ya sougri’’(Ndlr. La vie c’est le pardon).
Il ressort du discours du Premier ministre, qu’il y a un taux de croissance continu de 3, 9 à 6,6 entre 2015 et 2018. Ce qui vraisemblablement n’est pas ressenti dans le panier de la ménagère. L’activité économique ces dernières années est-elle en ébullition ?
Je ne suis pas économiste pour réponse aisément à cette question. La seule certitude que j’ai est qu’aujourd’hui les burkinabè sont mieux alimentés qu’hier. Je suis président de la Communauté Chrétienne de base (CCB) de Pissy, je suis en contact avec les populations, je peux vous affirmer que les burkinabè ne sont pas affamés. Donc, il y a une amélioration du panier de la ménagère. Mais nous devons toujours continuer à travailler pour maintenir le taux de croissance en progression constante.
Monsieur le Président, l’élection présidentielle de 2020 s’annonce avec probablement une pléthore de candidats. Comment les acteurs politiques devraient s’y prendre dans leurs discours pour ne pas dégrader davantage la situation sociale ?
Je vous répète ce que je vous disais auparavant : le problème du Burkina Faso provient des politiques. Chaque acteur veut être président tout de suite et maintenant. Je pense que chaque chose a son temps et qu’il faut savoir être patient. Présentement c’est Roch Marc Christian Kaboré qui est président et il n’a pas encore fini son mandat. Laisser le finir son mandat. Si son bilan est positif il sera accompagné pour un second mandat. Dans le cas contraire il sera sanctionné par les résultats des urnes. Après Blaise, si ce n’était pas Roch qui était au pouvoir le Burkina serait plus perturbé. Par ce que Roch a un tempérament non violent, il est patient et c’est pour cela que d’aucuns pensent qu’il est lent dans l’action, il est un diesel etc. J’ai été témoin de l’évolution sociopolitique du Burkina. Je peux vous dire que de Maurice Yaméogo à Roch Kaboré, le constat est qu’il y a plus de liberté maintenant que les années antérieures. Même le feu Président Lamizana qu’on considérait comme un bon père de famille il y a des choses qu’il ne tolérait pas. Aujourd’hui il y a de l’excès dans les revendications sociales, les grèves. Même vous les journalistes vous êtes plus libre maintenant que dans les régimes précédents. Thomas Sankara a très bien géré le Burkina, mais sous son régime ce qui se passe aujourd’hui serait intolérable. Il serait de même que sous le régime de Blaise. Mais Roch laisse tout le monde libre et il appartient à chacun et à tous de ne pas exagérer pour freiner l’essor du développement du Burkina.
Votre dernier mot ?
Le Burkina Faso est un beau pays, c’est un pays béni. Mon cri de cœur : les hommes politiques de grâce, il ne faut pas mettre le pays en feu. Par ce que si aujourd’hui le pays devrait s’embraser ça serait l’œuvre des hommes politiques. Donc, les hommes politiques pensés à vos femmes, vos enfants, vos parents, vos sœurs et frères et placés toujours l’intérêt national au-dessus de vos intérêts personnels. Nous gagnerons tous !
Interview réalisée par JTZ