Dans cette lettre ouverte adressée au président du Faso, le président du Faso Autrement Ablassé Ouédraogo, trouve scandaleux la gestion à la Lonab et invite le gouvernement à s`y préoccuper.
Excellence Monsieur le Président du Faso
Le mathématicien Albert Einstein a dit : « Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire ». Cette citation s’applique bien au Burkina Faso.
Il est devenu courant pour les Burkinabè d’entendre dire : « Laissez-les parler, laissez-les critiquer, ils finiront par se taire. Continuons de faire ce que nous avons décidé de faire ». C’est très méprisant. Cette façon de faire est une sorte d’incivisme dont les conséquences sont pénalisantes pour toute notre société et les exemples en la matière sont légion.
Dans le même souci, je m’en voudrais de ne pas attirer votre attention sur la situation très difficile, préoccupante et inquiétante que traverse la Loterie nationale burkinabè (LONAB) dont les derniers changements intervenus en septembre 2018 illustrent à suffisance une mauvaise gouvernance caractérisée et malheureusement synonyme de « pillage à ciel ouvert » des ressources financières de cette entreprise quinquagénaire qui a toujours garanti les bénéfices de ses activités à la nation entière, donc à nous tous et ensemble.
Excellence Monsieur le Président du Faso,
Vous dites faire de la bonne gouvernance votre priorité et vous n’arrêtez pas de le clamer, tout au moins de le répéter avec insistance en tout lieu et tout le temps, la dernière illustration étant votre discours à l’occasion du 58e anniversaire de l’accession de notre pays à la souveraineté nationale et internationale, célébrée à Manga autour du thème : « Bonne gouvernance, et équité sociale pour une nation forte et prospère ».
Nous savons que vous aimez le Burkina Faso et que vous ferez prendre immédiatement les décisions idoines suivantes afin de sauver la LONAB de la destruction :
• Suspendre le Conseil d’administration de la LONAB ;
• Mettre en lieu et place de la Direction de la LONAB, un Comité provisoire de gestion ;
• Faire un audit indépendant de la LONAB ;
- Rapporter la décision de changer la charte graphique avec la Calebasse et conserver le Canari d’origine, image de bonheur et de succès ;
• Rouvrir les clubs PMUB fermés arbitrairement à travers le territoire national malgré les injonctions du gouvernement et de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de Lutte contre la corruption (ASCE/LC).
Nos propositions afin d’assainir la gestion de la LONAB sont motivées par les manquements observés dans la forme administrative de la décision de changer la charte graphique ainsi que le coût exorbitant et inutile qu’implique l’opérationnalisation de ladite décision. Somme toute, une dépense colossale inopportune et injustifiable.
Ø Pour l’histoire, rappelons que la Loterie nationale voltaïque (LNV), créée par Ordonnance N°67025/Pres/MFC du 10 mai 1967, est devenue Loterie nationale burkinabè (LONAB) avec l’Ordonnance N°8443/CNR/Pres du 2 août 1984.
Le siège de la LNV était à l’hôtel Indépendance et le logo était le Canari rempli de pièces d’argent et nous autres, élèves au Lycée Philippe-Zinda Kaboré à l’époque, nous nous souvenons encore des fourgonnettes Citroën couleur rouge ocre, véhicules sobres et économiques, qui constituaient le parc automobile de cette entreprise naissante.
Le logo de la LNV-LONAB, fait d’un Canari rempli de pièces d’argent, a une signification touchant à notre culture. Non seulement, les ressources financières servant dans les transactions de nos ancêtres étaient gardées dans des canaris et lors de fouilles dans certaines régions de notre pays, des canaris remplis de cauris ont été découverts enfouis dans le sol. Mieux, le canari est un objet culturel utilisé pour puiser l’eau et pour conserver le dolo pour les rites et coutumes. D’ailleurs, ne dit-on pas que le gris-gris ne tarit jamais de son canari ?
C’est compte tenu du symbole que représente le Canari dans notre culture, que ce logo adopté depuis 1967, est resté pendant 51 ans comme l’identité visuelle de la LNV-LONAB avec un slogan significatif et sensé, à savoir « les lots aux heureux gagnants, les bénéfices à la nation entière », en mettant l’accent sur l’unité nationale.
Etablissement public à caractère industriel et commercial à sa création, la LONAB a été transformée en novembre 1994 en société d’Etat sous la tutelle du ministère de l’Economie et des Finances.
De ce qui précède, il faut accepter d’admettre que toutes les grandes décisions liées à la transformation de cette entreprise au cours de son existence ont toujours été prises en Conseil des ministres et non pas par une autre instance de décision. Ainsi donc, l’on peut considérer que les décisions faites par la réunion extraordinaire du Conseil d’administration de la LONAB en date du 27 septembre 2018, relatives au changement de la charte graphique de la LONAB, sont caduques, du fait de son incompétence pour prendre de telles décisions. D’ailleurs, cette réunion extraordinaire du Conseil d’administration avait pour ordre du jour la révision du budget 2018 et non pas l’adoption d’un nouveau logo, dont l’étude préalable n’a jamais été faite.
A ce propos et dans le parallélisme des formes ambiant, rappelons que tout récemment, les changements intervenus dans les dénominations de l’hôpital Blaise-Compaoré et de la SONAPOST ont été décidés en Conseil des ministres, respectivement le 1er août 2018 et le 29 novembre 2018. De ce fait, la LONAB est-elle une entreprise supranationale pour bénéficier de traitements différents que les autres entreprises publiques ?
Sans avoir même jamais exécuté l’étude relative au changement de la charte graphique, budgétisée pour 25 millions de F CFA en 2018 (décisions du Conseil d’administration du 28 décembre 2017) et dont les résultats devraient indiquer l’évaluation financière de cette opération, ou même conduit une quelconque enquête auprès du public sur la faisabilité et l’impact éventuel du changement, la réunion extraordinaire du Conseil d’administration du 27 septembre 2018 s’est arrogé indûment la responsabilité d’adopter le logo calebasse en lieu et place du logo canari pour la LONAB. Voyez à quel point ce changement frise la clandestinité.
Au cours du déjeuner de presse offert par la LONAB le 23 octobre 2018 pour présenter la Calebasse comme le nouveau logo ainsi que le nouveau slogan, le directeur général, M. Simon Touwendé Tarnagda, nommé lui-même par le Conseil des ministres du 3 mai 2017, pour quelques semaines avant de faire valoir ses droits à la retraite, a justifié que l’adoption de la nouvelle charte graphique a été faite pour répondre aux exigences du moment et on se demande lesquelles. Avec le slogan « Les lots aux gagnants et les bénéfices au Faso », qui est creux et insensé, ce sont les efforts de construction de la nation qui ont tout simplement été balayés.
Dame rumeur n’a-t-elle pas déjà annoncé le parachutage de l’actuel ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, Jean Claude Bouda, à la direction générale de la LONAB, après la célébration du 11-Décembre 2018 à Manga ? Ce poste particulièrement juteux est réservé aux parents, amis, copains et coquins des hommes forts du moment.
En plus, le nouveau logo n’a rien d’une Calebasse du Burkina Faso et les couleurs représentées se rapprochent beaucoup plus des couleurs d’un pays autre que le nôtre.
Ø Au plan financier, il est clair que le coût de cette opération de modernisation du Canari qui se transforme en Calebasse, laisse tout simplement libre cours au pillage à ciel ouvert des ressources de cette entreprise qui fait la fierté des Burkinabè et qui a contribué de façon significative au développement économique et social de notre pays.
Les factures de plusieurs centaines de millions de F CFA, que devra supporter la LONAB dans le cadre de l’opérationnalisation de ce changement de l’identité visuelle avec, entre autres, l’impression des documents avec le nouveau logo, la reprise du logo sur les bâtiments et édifices, sur les véhicules, dans les clubs PMUB, (environ un millier à travers le territoire national) et autres tombola minute, constituent une grosse perte et un énorme manque à gagner pour les citoyens burkinabè, principaux bénéficiaires des activités de la LONAB.
Ø Et que dire de l’impact et des conséquences au niveau de la propriété intellectuelle que représente la possession de ce logo avec le Canari qui est un capital construit sur 51 ans ?
En ces moments très difficiles et de vaches maigres pour notre pays, a-t-on besoin de telles opérations dont l’objectif ultime est de couvrir beaucoup plus les intérêts personnels que ceux de toute la nation entière ?
Excellence Monsieur le Président du Faso,
La situation dépeinte ci-dessus sur la gouvernance actuelle de la LONAB nous convainc que le temps presse dans cette entreprise d’Etat et qu’il est impératif que vous preniez en considération les préoccupations que nous venons de vous exposer ainsi que les propositions de réponses assorties. Sauvez la LONAB pour renforcer les capacités de développement du Burkina Faso.
Toujours dans la rubrique de la mal gouvernance qui semble être la marque déposée de votre régime, il serait indécent de ne pas rappeler à votre très haute attention, les cas récents suivants qui ont fait l’objet de questionnements publics, mais qui, jusque-là, n’ont pas reçu de réactions de la part de votre gouvernement :
ü La commande douteuse de 2 000 kalachnikovs d’un montant de 637 millions F CFA, par le truchement de la Société ARANKO International appartenant à un artiste musicien et qui a disparu après l’opération, comme présenté dans le journal Le Dossier numéro 23 de décembre 2018 ;
ü La construction, à Manga, dans un temps record et avec des moyens hors normes, de la forteresse, digne d’un émir du Golfe, par le ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, dont le coût intrigue plus d’un Burkinabè, au regard des capacités financières indiquées par le concerné au moment de son entrée au gouvernement.
Ainsi donc se porte le Burkina Faso, le pays des Hommes intègres, où la probité et l’intégrité ont été chassées par la corruption généralisée, la mauvaise gouvernance et l’incivisme.
Pour venir à bout d’une telle situation, nous vous recommandons vivement une rationnelle utilisation des ressources humaines, en mettant « l’homme » qu’il faut à la place qu’il faut et au moment où il le faut. Et au point où nous en sommes, il est impérieux de faire autrement pour changer la dynamique.
Cela est par ailleurs une urgence pour donner le bon exemple dans un contexte où l’annonce des nouvelles taxes pour le budget 2019 suscite de nombreuses interrogations et des grincements de dents chez les Burkinabè. Pas parce qu’ils ne sont pas prêts à payer leurs taxes et impôts pour la construction et le développement de leur pays, mais parce qu’ils se heurtent à la réalité de la gestion scabreuse et « mouta-mouta » de leurs contributions. C’est une véritable question de confiance entre votre gouvernance et les Burkinabè. Et vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas.
Veuillez agréer, Excellence Monsieur le Président du Faso, l’assurance de notre très haute et respectueuse considération.
Que Dieu bénisse le Burkina Faso.
« Rien n’arrête une idée arrivée à son heure »
Le Président
Dr Ablassé OUEDRAOGO
Commandeur de l’Ordre National