L’Association des géologues du Burkina Faso (AGBF) a été créée en 2012 dans l’optique de défendre les intérêts des géologues mais également tenir le public et les autorités administratives et politiques en alerte sur la gestion du secteur minier au Burkina. C’est dans cette dynamique qu’elle a organisée un panel autour du thème 12 Août 2017 à Ouagadougou, qui a regroupé des professionnels du secteur minier, de la Société civile et de nombreux étudiants. Nous avons saisis l’opportunité pour nous entretenir avec le Président de l’AGBF, M. Henri Némaro, qui nous fait ici le décryptage de l’utilité du panel, les forces et faiblesses de la gestion du secteur minier au Burkina Faso, la corruption qui y règne dans le milieu et ce que pourrait apporter les critiques du panel à la réorganisation de la gestion du secteur minier. Des propos dignes d’intérêts !
Iburkina.com: Monsieur le Président de l’AGBF, quels sont les objectifs poursuivis par votre Association en organisant un panel sur la gestion du secteur minier au Burkina Faso?
M. Henri Némaro : Nous avons organisé cette conférence critique sur la gestion du secteur minier, dans l’objectif que cette conférence puisse faire ressortir les forces et les faiblesses du secteur minier. Surtout de proposer des axes afin d’améliorer cette gestion minière. Là où il y a des forces il faut accentuer et continuer d’améliorer, et là où il y a des faiblesses il faudra bien évidemment corriger les insuffisances. C’était l’objectif principal de cette conférence.
D’une manière générale comment appréciez-vous la gestion du secteur minier actuellement au Burkina Faso ?
Personnellement, je pense que la gestion converge beaucoup vers le négatif que le positif. Comme vous venez de bien suivre toutes les interventions des conférenciers comme des invités, il faut souligner que la plupart des intervenants sont des gens avisés de la question car exerçant dans le domaine du secteur minier depuis des lustres et qui font surtout des recherches. Il ressort généralement qu’il y a plus de faiblesses que de forces dans la gestion du secteur minier a
u Burkina. On peut citer entre autre la corruption, la fraude, le capital humain qui véritablement n’est pas valorisé, notamment les ressources humaines nationales. Donc, il y a un certain nombre de pertes. De même on a passé d’une économie cotonnière il y a 10 ou 15 ans à une économie minière sans être préparée pour cette transition.
Certains ont certes tiré profit, mais d’autres absolument pas. D’où la nécessité de revoir la gestion du secteur minier national.
L’Assemblée nationale vient de publier une enquête parlementaire sur le secteur minier. Qu’elle est votre appréciation ?
Mon appréciation sur les résultats de l’enquête parlementaire a mis le doigt là où il y a le mal. Nous avons apporté aussi notre contribution à cette enquête minière menée par les parlementaires. L’enquête à fait des recommandations, et il faut les mettre en pratique. Pour moi cette enquête
est venue au bon moment. Mais Il faut prendre des décisions et sanctions si nécessaire. S’il faut faire des enquêtes et qu’il n’y a pas se suite cela ne sert à rien.
Trouvez-vous des similitudes entre les critiques des panélistes et les résultats de l’enquête parlementaire ?
Évidemment! Il a été dénoncé la fraude, les permis de recherche ou il y a des irrégularités, la question de la formation des ressources
humaines a été dénoncée, la corruption etc. En somme, il y a des faits qui se rencontrent, mais je vais vous dire que l’enquête parlementaire a concerné un certain nombre d’acteurs qui ont pris part à cette conférence. Et ils ont fait ressortir une fois encore le côté présent négatif de la gestion du secteur minier au Burkina. Donc, l’enquête parlementaire n’a reflété que l’opinion des uns et des autres qui étaient présent à cette conférence de l’AGBF.
De nos jours quelles sont les forces et les faiblesses dans la gestion du secteur minier burkinabè ?
Au niveau des forces, il faut souligner que le Burkina a un gros potentiel minier. On un code minier plus ou moins attractif qui est favorable aux investissements. Mais je ne vais trop m’attarder sur les forces. Je préfère dénoncer les faiblesses pour faire avancer les choses. Quand vous prenez la question de la fraude elle est existante, il y a deux ans 77 kilos d’or ont été saisis à l’aéroport de Ouagadougou. Le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) a fait un rapport là-dessus. La question des ressources humaines, la qualité de la formation est en train de se détériorer à l’université, il n’y a pas de spécialisation dans les formations, voici autant de faiblesses dans le secteur minier qui ne profitent pas au plan national à la population.
Le Secrétaire exécutif adjoint du REN-LAC, M. Sagado Nacanabo a évoqué dans son exposé, des cas de corruptions dans la gestion du secteur minier. Est-ce une réalité à votre avis ?
Oui! C’est une réalité. Le REN-LAC a même fait des publications. S’il indexait des personnes morales ou physiques, elles allaient porter plainte. Quand le REN-LAC dénonce des cas de corruption et cite des preuves et il n’y a pas de protestation, c’est que la réalité est manifeste. Je ne prends pas parti pour le REN-LAC, mais quand on dénonce et on apporte des preuves et que personne ne conteste, on peut admettre que la corruption est réelle. Autrement on peut porter plainte ou démontrer le contraire à ce que le REN-LAC dénonce.
Monsieur le Président que pourrait être l’apport de ce panel à la réorganisation de la gestion du secteur minier burkinabè?
A l’issu de ce panel, on s’est rendu compte que le temps était insuffisant pour débattre de tous les thèmes. Mais l’essentiel des points ont été abordés avec pertinence.
La première conclusion que l’on dire est que ça ne va pas dans le secteur minier.
La deuxième conclusion est que nous trouvons l’utilité de réorganiser cette conférence dans un autre cadre, avec plus de temps, afin de tirer davantage de meilleures conclusions, pour le développement du secteur minier.
Concrètement, comment doit-on réorganiser la gestion du secteur minier pour que cela profite réellement au développement du Burkina Faso ?
Il y a plusieurs aspects. Personnellement, je pense que le plus important se concentre autour de l’être humain. C’est-à-dire qu’il faut mettre l’homme à la place qu’il faut. Les décideurs doivent en outre doivent être animés de bonne conscience politique. Donc soucieux des intérêts de la population. Aussi, il faut qu’on arrive à ce que l’offre de formation réponde aux besoins du secteur minier. Élaborer des textes rigoureux sur le secteur minier et les appliqués également dans toute sa rigueur. Parce que tout tourne autour de l’homme qui décide et de l’homme qui exécute.
Interview réalisée par :
Théodore ZOUNGRNA
Email : tzoungrana@yahoo.fr