Son Excellence Poé Naaba, député de l'UPC à l'Assemblée nationale

Le député Justin Compaoré, plus connu Poé Naaba, est un cadre de l’Union pour le Progrès et le Changement (UPC). Un parti politique qui assume le poste de Chef de fil de l’opposition au Burkina Faso. Également ministre de la Justice de Sa Majesté le 

«Le député UPC n’a jamais orienté son choix contre les intérêts fondamentaux de la population»

Mogho Naaba Baongo, c’est avec tac et pondération qu’il conjugue son engagement politique et son rôle de chef coutumier et traditionnel. Nous l’avons rencontré à sa résidence à Ouagadougou, pour évoquer les sanctions affligées aux deux députés de l’UPC (Albert Élisée Kiemdé et Kodjo Jacques Palenfo), la démocratie au sein de son parti, la fronde sociale toujours en ébullition au Burkina, la décision des parlementaires de la CEDEAO sur la limitation de la naissance de trois enfants par femmes etc. Leader politique et leader de la chefferie coutumière, le Poé Naaba tient des propos dignes pour l’intérêt de l’UPC et  l’intérêt national. A lire absolument !

Iburkina.com : Monsieur le député, selon vous quel est

l’état d’esprit qui devrait animer un groupe parlementaire dans une Assemblée nationale? Plus particulièrement à l’UPC, il y a-t-il un code de conduite des députés du groupe parlementaire ?

Député Justin Compaoré (Poe Naaba) : Merci de nous donner l’opportunité d’éclairer l’opinion nationale sur la question, et surtout nos camarades du parti. L’esprit qui devrait animer un député du groupe parlementaire de l’UPC, est le même esprit qui l’a guidé dans le choix de son militantisme à l’UPC. En ce sens que nous sommes un parti dans lequel un groupe de femmes et d’hommes animés d’une vision de se projeter dans la vie, de marcher ensemble avec les burkinabè et c’est cet esprit qui devrait animer tout militant du parti du ‘’Lion’’. Même en tant que cadre, ou député, nous restons dans l’esprit du militantisme. Nous avons ensemble une vision pour le Burkina Faso, une vision pour son développement et son progrès. Rappelez-vous que quand nous avons créé l’UPC, nous avons prôné le ‘’Changement et le vrai changement’’. Parce que nous voulons poser une nouvelle base sociétale. En somme, l’esprit qui devrait animer un député de l’UPC est l’esprit de vaincre ensemble et surtout de progresser ensemble avec le peuple burkinabè.

Le mandat du député étant par principe national. Doit-il nécessairement obéir aux intérêts politiques de son parti au détriment de l’intérêt général?

Ce qui est intéressant de savoir est que ‘’La force du loup, c’est la meute et la force de la meute, c’est le loup’’. Alors, avoir ensemble milité dans le parti du ‘’Lion’’, nous sommes persuadé que pour être une vraie force, il faut que nous regardions dans la même direction. C’est pour cette raison d’ailleurs que les candidatures ont été présentées par le parti. C’est parce que nous savons qu’ensemble nous pouvons gagner que nous avons présenté une candidature de liste. Le député de l’UPC ne fait pas ses choix au détriment de la majorité des burkinabè.

Parce que cette majorité c’est l’ensemble des couches paysannes, des femmes vulnérables et des enfants non scolarisés. Donc le député UPC n’a jamais orienté son choix contre les intérêts fondamentaux de la population. Nous réfléchissons ensemble, mais chacun de nous peut avoir son autonomie de penser, mais au finish l’action doit être commune.

L’UPC vient de sanctionner deux de ses députés au prétexte de ne pas suivre les consignes du parti lors du vote à l’Assemblée nationale sur le PPP. Est-ce que l’UPC ne devrait pas  saisir le comportement de ces deux députés comme un exemple vivant de la démocratie interne au sein du parti ? Quel message l’UPC voulait faire passer par ces sanctions ?

Je voudrais d’abord vous rappelez que l’UPC est un parti Social-libéral. Le libéralisme est l’idéologie qui donne la plus grande liberté d’expression aux femmes et aux hommes et surtout celles et ceux travaillant dans les médias. Un regard rétrospectif permet de constater que c’est grâce au libéralisme que la presse a pris l’envol de sa liberté.

C’est le même espritqui nous anime à l’UPC. Cependant, je vous rectifie, que nos camarades

«Je ne pense pas que les sanctions contre les deux députés puissent fragiliser l’UPC»

n’ont pas été sanctionnés pour leur vote de la loi du 03 juillet dernier à l’Assemblée nationale sur le PPP. Pour le camarade Albert Élisée Kiemdé, qui est un des membres éminents du bureau politique national, n’a pas participé aux réunions du bureau depuis  près de deux ans. Le camarade Élisée envers et contre tout a refusé de s’expliquer sur sa non- participation aux réunions du Bureau politique national (BPN) et celles du Secrétariat  exécutif national (SEN) étant également membre du SEN. Plusieurs demandes d’explications ont été demandées et sont restées sans suite. Donc ce n’est pas le vote du 03 juillet 2017 qui est véritablement le motif de l’exclusion du camarade Élisée du parti. En ce qui concerne le camarade Kodjo Jacques Palenfo, quand il a pris la parole après notre départ  de l’Assemblée nationale (tout simplement parce que nous n’avions pas la liberté de nous exprimer), le camarade Palenfo est resté et a pris la parole en traitant ses autres camarades ‘’d’hommes et de femmes qui manquent de courage’’. Je pense que dans un groupe il y a des règles qui gouvernent. Le groupe parlementaire a son règlement intérieur et ses statuts. Il en est de même pour l’UPC. Et c’est en référence à ces principes fondamentaux que le camarade a été blâmé.

Y a-t-il pas un risque de fragiliser la cohésion au sein de l’UPC et démobiliser une partie des militants?

Dans un parti politique comme l’UPC, le MPP, l’UNIR/PS, le PAREN, qui sont des partis représentatifs de notre environnement politique, il ne peut pas à un certain moment manquer de divergences. Mais le plus important est que ces divergences ne sont pas fondamentales au point de diviser le groupe. Je pense que ce qui est arrivé ne sont pas des divergences idéologiques au point qu’on n’arrive plus à s’asseoir ensemble, mais des comportements isolés. Ceci étant, je ne pense pas que cela puisse fragiliser l’UPC.

Parlons du boycott des votes à l’Assemblée nationale, l’expérience montre que la politique de la chaise vide est toujours improductive pour les partis qui s’y adhèrent à cette pratique. N’est-ce pas?

L’UPC depuis le début de la législature en décembre, a toujours participé de façon intelligente et efficace à la gouvernance et à la gestion de l’Assemblée nationale. Je crois que depuis l’histoire de la 7ème législature, c’est la seule fois que l’UPC a claqué la porte. Vous vous souviendrez de la déclaration du président du MPP qui est par ailleurs le parti majoritaire à l’Assemblée nationale (Ndlr, Dr. Salifou Diallo) qui disait que :’’Ceux qui ne veulent pas la loi PPP (Partenariat Public-Privé) peuvent prendre leurs valises et quitter le Burkina Faso’’. C’était déjà pour dire qu’il n’y aura pas de discussion à l’Assemblée sur la loi. Nous n’avons pas demandés l’abandon de la loi, mais seulement des amendements. Mais avant la discussion de la loi en plénière, on nous faisait savoir que la loi allait être adoptée quel que soit les résistances et les propositions que nous allons avancer. Comme vous voyez le débat était déjà plié avant la plénière et nous on ne voyait plus notre rôle de participer à ce débat à l’Assemblée.

En tant que Parlementaire que faites-vous actuellement des différentes enquêtes parlementaires sur les mines, le foncier etc.?

L’Assemblée nationale, fait  des enquêtes mais ne peut pas se substituer à l’Exécutif. L’Assemblée a fait des enquêtes, qui ont pu révéler des insuffisances et a proposé que ses insuffisances puissent être comblées par des actions. Je pense que la plupart de ces actions relèvent de l’Exécutif. Bien sûr l’Assemblée peut prendre des législations pour corriger un certains nombres d’insuffisances, mais ne peut aller au-delà. Ce que nous pouvons faire, c’est de proposer des lois qui puissent corriger les insuffisances.

Excellence le Poé Naaba, la fronde sociale est toujours agitée depuis quasiment deux ans au Burkina avec de multiples grèves, protestations diverses qui freinent l’activité économique et menace la stabilité sociale et politique du Burkina, si on n’y prend garde. Quelle devrait être la contribution des chefs coutumiers et de la classe  politique de l’opposition pour apaiser cette crise sociale ?

Merci pour cette question qui est digne d’intérêt général. Effectivement le Burkina travers des crises multiples et multiformes liées à des revendications tous azimuts. Nous parlons chaque fois d’incivisme, mais il faut savoir que cet incivisme ne concerne pas seulement les citoyens du bas-peuple. La prise de conscience doit concerner aussi les autorités administratives et politiques qui prennent les décisions. Je pense qu’à ce niveau il y a un effritement assez grand de l’autorité de l’Etat. Il faut qu’on puisse établir cette autorité. Rétablir l’autorité de l’Etat suppose, que les autorités politiques et administratives  à un certain niveau doivent adopter des comportements exemplaires.

Pour les chefs coutumiers et traditionnels, notre institution doit être une force de proposition. Vous en tant que homme de média et observateur des actions des chefs coutumiers, vous savez bien que nous avions toujours été présents pour donner des conseils, professer des prières et interpeller la classe politique dans son ensemble pour que le Burkina Faso puisse être apaisé par le comportement de chacun. Egalement en tant que homme politique appartenant à l’opposition politique, nous devons faire également des  propositions. Lorsque nous critiquons les actions des autorités au pouvoir, nous devront faire des propositions complémentaires. Car l’opposition ne doit pas seulement se contenter de critiquer, mais plutôt être une opposition constructive de la Nation. En tant que burkinabè il est de notre devoir de se battre pour des valeurs d’intégrité, de courage et surtout avec l’esprit constant de préserver de la paix.

La CODER prône la réconciliation nationale et le pardon. Votre avis ?

Nous sommes conscients qu’un pays divisé, est un pays qui a du mal à se développer et à prospérer. Parce qu’un pays se construit avec l’engagement de l’ensemble de ses filles et de ses fils. Donc, nous pensons que pour arriver à une réconciliation durable, à une vraie réconciliation, il faut que nous puissions chasser les démons du passé. Chasser les démons du passé, c’est parvenir à nous dire la vérité et faire triompher la justice. C’est à ce prix que nous allons construirons un Burkina Faso apaisé ; un Burkina réconcilié avec lui-même.

Excellence Poé Naaba, les parlementaires de la CEDEAO, de la Mauritanie et du Tchad limite pour la limitation de 3 enfants par femmes. Comment cette décision est perçue par les autorités coutumières ?

Je ne peux pas me prononcer au nom de l’ensemble des chefs coutumiers et traditionnels du Burkina, parce qu’ils m’ont pas mandaté pour cela. Mais je peux dire qu’en tant qu’homme politique, chef coutumier et traditionnel et citoyen simplement, je pense que ce qui a été décidé après la réunion des parlementaires de la CEDEAO,  c’est encore des textes de plus. Il faut que nous puissions d’abord connaitre fondamentalement l’esprit, et les espérances de la population, connaitre les problèmes des populations. Lorsque les populations ne sont pas conscientes déjà que faire dix enfants c’est accroitre les charges sociales, c’est difficile de les convaincre de faire moins d’enfants. Dans nos pays il y a encore plus de 80% de personnes analphabètes et c’est ça qui plombe aujourd’hui le développement de l’Afrique. Au Burkina, on travaille à augmenter le taux de scolarisation tout en oubliant d’augmenter également le taux d’alphabétisation, je pense que le combat va être très difficile. Lorsqu’un père de foyer ne comprend pas que sa difficulté  est liée aux nombre d’enfants à sa charge, il faut nécessairement passer par la sensibilisation et la communication. Les parlementaires auraient proposés de voter d’abord des lois dans ce sens.

Votre message à l’endroit de la jeunesse, des travailleurs et des paysans du Burkina ?

D’abord je remercie votre média, qui permet les leaders politiques, religieux et coutumiers de partager leurs opinions avec l’ensemble de la population. Je voulais encourager la jeunesse burkinabè à développer plus d’initiative privée, parce que dans les grandes nations d’aujourd’hui, l’initiative privée a pris de l’envol dans le développement économique et social. J’encourage également les décideurs à prendre des décisions fortes pour accompagner les initiatives de la jeunesse. Nous sommes en saisons hivernale, je profite invoquer Dieu, les mânes des ancêtres qu’ils fassent descendre abondamment une bonne saison pluvieuse et de bonnes récoltes. Car, quand il y a à boire et à manger en abondance, nous aurions la clairvoyance de travailler ensemble main dans la main pour un Burkina prospère.

Interview réalisée par :

Théodore ZOUNGRANA

Email : tzoungrana@yahoo.fr

 

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