Sans surprise avec le boycott de l’opposition, le « oui » à la nouvelle Constitution ivoirienne a remporté une victoire écrasante avec 93 % des suffrages exprimés, et un taux de participation de 42 %, selon les chiffres provisoires de la Commission électorale. L’opposition dénonce des résultats truqués.
Si les résultats sont validés par le Conseil Constitutionnel, la Côte d’Ivoire pourra entrer dans sa IIIe République. Parmi les principaux changements apportés par le projet de nouvelles Constitution, l’évacuation du concept d’ « ivoirité », permettant de clarifier les conditions d’éligibilité du Président.
Évacuation de l’ « ivoirité », création d’un Sénat et d’un vice-Président
Ses détracteurs avaient reproché à Alassane Ouattara son origine burkinabè et contesté à plusieurs reprises son éligibilité. Le concept d’ « ivoirité » a miné la stabilité du pays pendant plus de dix ans.
Le projet prévoit aussi la création d’un poste de vice-Président et d’un Sénat, il institutionnalise la Chambre des rois et des chefs traditionnels et étend le domaine de compétence du Conseil économique et social à l’environnement.
L’opposition avait appelé au boycott du référendum sur le projet de nouvelle Constitution, reprochant au pouvoir de n’avoir consulté ni les opposants ni la société civile, et qualifiant le texte de »monarchique et rétrograde ».
En raison de la consigne de l’opposition, le taux de participation était donc les principaux enjeux du scrutin de dimanche 30 octobre. Dans le détail, le « oui » a obtenu 2 480 287 voix (93,42%) alors que le « non » a obtenu 174 714 suffrages (6,58%). 2 678 601 des 6 313 58 inscrits se sont rendus aux urnes pour un taux de participation de 42,42% (23 500 blancs ou nuls).
Taux de participation participation « honorable »
« Plus de 90% ! C’est un sentiment de joie et de fierté. Les Ivoiriens ont compris qu’il fallait tourner la page de nos turpitudes, qu’on sorte de cette Constitution qui nous a amené la guerre pour entrer dans la IIIe République pleins d’espoir », a réagi auprès de l’AFP Joël N’Guessan, le porte-parole du Rassemblement des républicains (RDR), le parti du Président Ouattara.
« Je dis bravo aux Ivoiriens : le score de 42% (de participation) est honorable », a-t-il ajouté, réfutant fermement l’opposition qui avait annoncé des chiffres de participation inférieurs à 10% : « Ce sont des chiffres sortis de leur laboratoire à mensonges ! »
« Des chiffres manifestement truqués »
De son côté, Pascal Affi N’guessan, le président du principal parti d’opposition, le Front populaire ivoirien (FPI) fondé par l’ancien Président Laurent Gbagbo, a déclaré à l’AFP : « Ce sont des chiffres manifestement truqués qui ne correspondent pas à la réalité. Nous avons tous été témoins du désert électoral [de dimanche]. »
« Il a évoqué des cas de « corruption et de bourrage d’urnes », assurant que ce « résultat ne nous concerne pas. La participation ne dépasse pas 10 %. La bataille à venir c’est de mobiliser pour conquérir l’Assemblée nationale » [lors des législatives à venir, dont la date n’est encore non fixée mais avant la fin de l’année, ndlr] pour abroger la nouvelle Constitution « et faire rempart à l’exécutif ».
Une « mascarade » électorale pour le Front du refus
En août 2000, six mois après le coup d’État de Noël 1999, la deuxième Constitution ivoirienne avait recueilli 87 % de « oui » pour un taux de participation de 56 %. Certains membres de l’opposition estimaient donc que le pouvoir actuel devait obtenir au moins le même score pour que le nouveau texte soit légitime.
Avant l’annonce des résultats, l’autre coalition d’opposition, le Front du Refus-Coalition du non, avait parlé de « mascarade » électorale et de participation située entre 3 et 5 %.
Des incidents pendant le vote
« Il n’y a pas beaucoup d’engouement », notait avant le scrutin le chercheur Meite Mamoudou , qui soulignait qu’il y a « un fort taux d’illettrisme, donc les gens ont du mal à connaître le texte ».
Ce lundi 31 octobre, la Plateforme des organisations de la société civile pour l’observation des élections en Côte d’Ivoire (Poeci) a estimé que « l’élection s’est globalement bien déroulée en dépit de quelques incidents signalés par les observateurs ».
Des groupes de jeunes ont toutefois perturbé le processus de vote, saccagé ou emporté du matériel électoral dans plusieurs villes. Le ministre de l’Intérieur, Hamed Bakayoko, avait parlé d’incident dans quelques bureaux de votes sur un total de quelque 20 000.
Source : AFP